Si vous avez suivi un peu la saga de l’acquisition d’Activision-Blizzard en direction de Microsoft, vous avez probablement vu qu’il y a eu un dénouement partiel récemment. C’était vis-à-vis l’enquête du Federal Trades Commission pour s’assurer que Microsoft ne s’embarque pas dans un autre monopole. Bonne nouvelle pour Microsoft; ils ont le feu vert, des États-Unis du moins, pour mettre la main sur la compagnie en attendant le Royaume-Uni. La conclusion mènera à la plus grosse transaction de tous les temps dans l’industrie et par beaucoup. Une centralisation sans précédent qui met des centaines de titres sous le giron du gros M.
Pour sûr, plusieurs célèbrent cette acquisition en disant que ce sera bien pour plusieurs franchises ainsi que de la facilité à connecter les expériences ensemble. J’entends bien, mais personnellement, je vois ça d’un autre œil. C’est la centralisation de beaucoup beaucoup d’investissement vers une compagnie. C’est énormément de subventions et d’opportunités qui iront directement à des compagnies qui, pourtant, pourraient complètement financer leurs efforts sans aide.
Ça passe ou ça casse
Le truc, c’est que les investisseurs regardent toujours les gros poissons et quand un studio indépendant cherche des investissements, les ressources deviennent rapidement limitées. Comment convaincre un investisseur que ton idée est excellente quand tu n’as pas de machine marketing monstrueuse, un coffre de guerre énorme et une armée de développeurs près à sortir le prochain blockbuster ? Il y a toujours le retour sur l’investissement qui vient jouer les trouble-fête. On ne donne pas des sous sans promesse que ça nous revienne éventuellement n’est-ce pas ?
Scavengers Studios, studio indépendant local de Montréal à payer le prix récemment en faisant des coupes drastiques à ses effectifs. Les coupures ont été si sévères que seulement 16 personnes restaient. La raison? Leur dernier jeu, Seasons: A Letter to the Future n’a pas fait bouger un nombre de copies satisfaisantes pour être capable de continuer au même rythme. Une grande partie de ces jobs devait, en théorie, aider à lancer son prochain projet.
Ce genre de situation, c’est un peu la normale, depuis que j’ai commencé à couvrir le jeu vidéo. Un studio a une incroyable idée, met de l’investissement personnel pour avancer le projet et attend la manne d’une des rondes de financements d’organismes. Le plus populaire, le Fond des médias canadiens (FMC) est souvent un moment « ça passe ou ça casse » pour bien des studios qui veulent réaliser leur projet. Malheureusement, c’est souvent un moment « casse » qui arrive et c’est souvent des rêves brisés et des jobs perdues qui en résultent, faute d’argent.
Une manne pour qui ?
Ça me crève le cœur de voir des projets très créatifs et très prometteurs être abandonnés. Sauf qu’on ne doit pas se faire d’illusions, les organismes comme le FMC qui procurent une manne financière aux jeunes studios ne sont pas des charités et surtout, ils doivent choisir ce qui va être rentable à leurs yeux. Pourtant, quand on parle de cette dépendance à ces fonds-là, tu as des géants bien nantis qui profitent énormément de subventions et aides financières qui frisent le million de dollars, des subventions à la recherche et j’en passe. Certaines aides financières peuvent aider à payer jusqu’à 40% des rémunérations.
Quand on regarde qui en profite, plusieurs indépendants y sont, mais ce sont les les Ubisoft, Microsoft et autres studios AAA issus de compagnies avec des poches « profondes » qui retirent le plus. Initialement, ces subventions ont été mises en place pour attirer les joueurs du jeu vidéo à venir s’établir dans la « Citée du Multimédia » ainsi que d’autres compagnies du domaine technologique et on est forcé d’admettre que le programme a été un succès à voir comment Montréal se positionne aujourd’hui.
Alors pourquoi continue-t-on de donner ces cadeaux à de grosses corporations, maintenant fermement établies depuis plus de deux décennies?
Changer l’histoire
Loin de moi vouloir nuire à l’industrie locale, mais je crois que ces financements éléphantesques, ces « deals » de financements de projets auraient en ce moment plus de valeurs à être mis dans de nouveaux projets de studios locaux qui courent après les opportunités de faire vivre de merveilleuses expériences sans toujours avoir des actionnaires aux attentes démesurées.
C’est aussi une question d’occasions pour ceux qui travaillent dans l’industrie comme studios indépendants et qui voudraient travailler sur un projet qui les fait vibrer. Ceux qui veulent créer sans nécessairement se faire dire de rajouter des microtransactions par un gars en complet déconnecté de la réalité et qui abhorre la créativité.
En faisant ça, il est possible qu’on aille trouver un meilleur juste milieu pour que les créateurs indépendants risquent moins pour réaliser leurs rêves et que ces grosses compagnies assoiffées de profit puisent un peu plus piger dans leurs poches…
Parce qu’avoir de l’ambition et surtout du crant de vouloir réaliser son rêve ne devrait pas être fait à la solde ou le bon vouloir des géants de l’industrie, mais par son propre travail et sa passion de l’industrie.